Dimanche 27 janvier 2019
6h30 je prends le petit déjeuner et une douche comme demandé.
7h30 on nous emmène dans un petit box plutôt glauque, monito, contrôle du col
8h00 « Je suis Anne, c’est moi qui vais rester avec vous » Ton papa me dit que tout ira bien, que dans son regard il a lu la bienveillance, et ton papa il est doué pour ça.
« Mais dit donc, il y a des contractions au monito, et elles ont des effets sur votre col, vous êtes à 2. » Pleine d’espoir, je demande s’il est possible de se laisser quelque temps pour temporise…on me répond que non, « malheureusement » dit Anne.
8h30 Anne me pose le fameux « Propess ». Le médecin passe avec l’anesthésiste pour me redire que poser la péridurale serait le sens même car il y a une double indication médicale dans mon cas : antécédent d’hémorragie de la délivrance massive et suspicion de macrosomie.
8h36 Oulala je ressens des contractions douloureuses, on dirait que ça fonctionne.
Environ 9h30. Punaise ! ces contractions, elles sont énormes, elles me font mal, elles me font mal comme les dernières du premier accouchement, elles ne me donne pas de répit. Elles durent une minute et reviennent toutes les 3. Mais je gère, je respire, je marche, ton papa me masse, ton papa me donne de l’homéopathie, Anne est là. Elle dit « on change de salle, rien qu’a voir votre tête, c’est sûr, c’est efficace, ne restons pas dans ce tout petit box. »
10h45 Je voudrais prendre une douche, c’est possible. Ce sont des douches de vestiaires, pas très ragoutant mais l’eau chaude me fait un bien fou. Ton papa est là, patient, à l’écoute, aux petits soins. La douche me permet de reprendre des forces.
11h30 ça commence à être très dur. Les contractions ne me donnent aucun répit. Je continue à bien respirer mais je ne trouve pas de positions qui me soulagent…Je vomis. Plusieurs fois.
12h30 Anne contrôle mon col. Il s’est bien centré mais il est ouvert à 3. 4h, 1 centimètre, rien à voir avec l’arrivée de ta sœur où les contractions étaient espacées, la douleur gagnant progressivement en intensité. Là, je suis dans le « dur » depuis 4h. Je vomis, encore.
13h30 Je reprends une douche, mais cette fois-ci, elle ne me procure pas le soulagement de la première. Je lis une grande détresse dans le regard de ton papa. Je commence à douter. L’arrivée de ta sœur s’est faîte dans grande sérénité que je ne suis pas en mesure de t’offrir : je n’ai pas beaucoup dormi, les médecins m’ont mis la pression pour la péridurale…que c’est dur. Je commence à me dire que je devrais prendre la péridurale.
14h Je discute avec Anne. « vous êtes incroyable, regardez votre force, ça fait presque 6 heures que vous supportez la douleur. Je vois l’intensité et la fréquence des contractions sur le monito et je peux vous dire que vous êtes une battante. La plupart des femmes auraient craqué mais vous êtes là. Si vous prenez la péri, je veux être sûre que vous ne la regrettez pas. »
« Anne, je voudrais mettre au monde mon enfant dans la plus grande sérénité possible, comme ma grande puce, et là je ne suis pas sereine, j’ai l’impression que je n’arrive pas à lâcher prise, que je ne laisse pas les contractions faire leur travail. Allons-y ! »
14h30 On me pose la péridurale. « J’ai demandé à l’anesthésiste de ne vous mettre qu’une demi-dose et elle a accepté. Vous avez la pompe maintenant, c’est vous qui gérez ».
Progressivement, la douleur s’en va. Je ressens le besoin d’être seule. Je dis à ton papa d’aller fumer une cigarette pour se ressourcer. En pleurant, je te dis pardon d’avoir pris cette décision de précipiter ta naissance et pardon de n’avoir pas su être assez forte pour le faire sans anesthésie. Dès lors que nous avons décidé de te concevoir, j’ai juré de prendre soin de toi, et je crois que tu as besoin d’une maman sereine plus qu’une maman fière d’avoir accouché sans péridurale. La situation est venue bousculer mes idéaux, sûrement pour mieux te convenir, tel est notre chemin maintenant.
16h30 Les contractions reviennent aussi progressivement qu’elle sont parties, mais aussi sûrement ! « Vous avez bien travaillé, col à 8 m’annonce Anne ». Je me demande ce que je peux faire pour t’aider à venir. Anne me montre des positions. Je m’accroche à ton papa en même temps que je bouge comme je peux pour ne pas sortir du lit, en tailleur, à 4 pattes, je fais bouger mon bassin. Je ressens tout à présent. Je pousse des râles pour accompagner cette douleur, mais maintenant je suis sûre qu’elle me guide vers toi, là tout bientôt. Je sens quelque chose aller et venir dans mon vagin « la poche des eaux » me confirme Anne. J’ai déjà envie de pousser « Ce n’est pas encore le moment », mais j’ai vraiment envie. « Vous êtes à dilatation complète, on va pouvoir s’installer, tiens, mettez-vous sur le côté en position de Gasquet, voir c’est confortable et optimal pour la sortie. Ton bébé se présente parfaitement, probablement grâce à tout ce que vous faîtes depuis tout à l’heure. Je vais chercher mes collègues, vous savez, je prépare aussi la délivrance, je n’ai pas envie que vous reviviez votre premier accouchement. »
Elle passe la porte. Je ne tiens plus. Je regarde ton papa, m’accroche à sa nuque de mes deux bras et pousse en poussant aussi un hurlement sorti du plus profond de mon corps. « Arrête, arrête puce, y’a plus personne et tu vas me briser la nuque »…Je dois pousser, si si, c’est ça qu’il faut que je fasse, je ne peux pas faire autrement…
Anne est 3 autres personnes entre en trombe dans la salle, je jette juste un regard qui me permet de constater que ta tête est déjà dehors ! Anne me supplie d’attendre 2 secondes, ce que je parviens difficilement à faire. Une dernière poussée et tu sors de moi. Je vois direct que tu es un petit garçon. Anne a oublié de regarder l’heure, mais Papa l’a fait, 17h10. Papa te nomme, et il me regarde les yeux plein de larmes, pose son front contre le mien et me murmure, les yeux dans les yeux, « merci ! ».