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Retour du congrès épisode II : Douleur des bébés, n'avions nous pas toujours su ?

Tatian@

Modératrice
Membre de l'équipe
Animatrice LLL
Une conférence de Didier Cohen-Salmon.
Didier Cohen-Salmon est médecin anesthésiste. Il fait partie des pionniers qui se sont engagés pour changer le regard sur l’enfant malade et sur les séquelles des soins douloureux. Il a fondé l’Association Sparadrap.

Cette conférence comportait des passages difficiles à entendre et je l'ai ressentie comme un plaidoyer pour écouter les bébés et leurs parents. En effet, alors que l'anesthésie par inhalation d'éther date de 1846, jusque dans les années 1980 il n'était pas rare d'opérer les enfants de circoncision, végétations ou d'amygdalectomie sans anesthésie. Avant les années 80, il était admis par l'immense majorité des médecins que les bébés ne ressentaient pas la douleur pour cause d'immaturité neurologique. De plus, ils pensaient que si la douleur existait ce n'était pas grave car les bébés ne s'en souvenaient pas. Les pratiques reposaient sur des croyances et pas sur des démonstrations scientifiques. Il aura fallu attendre 1987 pour que la preuve scientifique soit faite que les bébés ressentaient la douleur ! Des études et des histoires dramatiques démontreront que les douleurs subies par les nourrissons peuvent non seulement laisser des traces (traumatismes) mais aussi aller jusqu'à provoquer le décès.

Au final il était bien plus "simple" pour les soignants de considérer que le bébé n'avait pas mal alors même qu'ils n'avaient aucune preuve de ce qu'ils croyaient. Cette vision, à l'opposé de la démarche scientifique que l'on pourrait attendre de la part de médecins, est incompréhensible à présent que l'on sait.

Le parallèle que je fais avec l'allaitement c'est que les mères savent. Les mères savaient que leur bébé avait mal, quoi qu'en disaient les médecins.
"Ce n'est pas parce qu'ils sont nombreux à avoir tort qu'ils ont raison" (Coluche)
Un soignant doit toujours pouvoir donner les preuves étayées de ce qu'il dit sans quoi il s'agit d'une croyance, d'un avis mais pas d'un fait scientifique.
 

Pauline C

Fontaine de lait
Adhérent(e) LLLF
Avant les années 80, la culture scientifique dans la médecine n'était pas très développée. Ce qu'on appelle l'ebm, evidence-based-medicine, avec des exigences statistiques, a commencé à se développer à cette époque. Auparavant on se fondait sur l'observation et l'expérience. Désormais on exige des études contrôlées pour prouver association et causalité (avec pour effet secondaire que des procédures empiriquement efficaces ne font pas mieux que Le placebo quand on les teste en conditions strictes parfois). Pour la douleur chez l'enfant et le bébé, c'est devenu un point de vigilance particulier, parce que l'exposition précoce à la douleur conditionne le développement du système nerveux et la sensibilité du système douloureux, d'où le développement de méthodes analgésiques pour les procédures simples (solution sucrée, patchs anesthésiants), et le développement d'échelles d'hétero évaluation pediatriques.
Il y a plein d'exemples de la sorte, Semmelweis et l'hygiène des mains, le couchage des bébés, les bêta bloquants dans l'insuffisance cardiaque...
 

Tatian@

Modératrice
Membre de l'équipe
Animatrice LLL
:jap: Oui, c'est vrai que la médecine a énormément évoluée à la fin du XXème siècle, aussi avec les progrès de l'imagerie qui ont permis de mieux comprendre la physiologie.

La réflexion personnelle que je me suis faite après cette conférence c'est "ok, on n'avait pas les connaissances, mais les familles et les enfants montraient des signes que la douleur du bébé existait". Signes qui n'ont pas été vus, signes que les sachants ne trouvaient pas utile de prendre en compte puisqu'ils avaient déjà leur propres convictions sur le sujet.
Heureusement, certains soignants comme Didier Cohen-Salmon se sont saisis de cette incohérence
Le point de vue majoritaire sur la douleur de l’enfant pourrait être celui du docteur Daniel Alagille, patron de pédiatrie, qui écrivait en 1992 : « Les bébés ne souffrent pas. Lorsqu’ils crient, c’est de colère, de faim, de soif, ou bien encore pour rien. De toute façon, c’est bon pour eux, comme leur premier cri à la naissance, cela défrise leurs alvéoles et améliore la capacité respiratoire. » Ce langage était celui que j’entendais au seuil de ma formation et de là est née une attitude de révolte qui m’aura accompagné pendant toute ma vie professionnelle.
 

Cactus2002

Fontaine de lait
Adhérent(e) LLLF
causalité (avec pour effet secondaire que des procédures empiriquement efficaces ne font pas mieux que Le placebo quand on les teste en conditions strictes parfois). P
C'est vraiment intéressant. Est ce qu'on en déduit que la substance testée n'est pas assez efficace ou que le placebo a une véritable utilité dans le traitement de la pathologie en question ?
Et est ce qu'on ne fait pas aussi un troisième groupe de patients avec aucun traitement pour comparer au placebo ?
 

cerise

Modératrice
Adhérent(e) LLLF
C'est vraiment intéressant. Est ce qu'on en déduit que la substance testée n'est pas assez efficace ou que le placebo a une véritable utilité dans le traitement de la pathologie en question ?
Et est ce qu'on ne fait pas aussi un troisième groupe de patients avec aucun traitement pour comparer au placebo ?
Ce sont des tests dont le but est de savoir si le traitement a un effet.
Donc effectivement, constater que c'est plus efficace que le placebo sert à évaluer le traitement. Et donc son intérêt à le mettre sur le marché.
 

Pauline C

Fontaine de lait
Adhérent(e) LLLF
La plupart du temps, ce sont de vieilles molécules, ou de vieilles procédures, qui sont de toute façon déjà utilisées. Personne n'est prêt à mettre beaucoup d'argent pour faire des études de grande ampleur, et vérifier que ça marche ; ou personne n'envisage de donner un placebo à la moitié des patients.
 
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