Allaitement et anesthésie générale, loco-régionale et locale
Une interruption de l’allaitement, pendant un temps plus ou moins long, est trop souvent recommandée aux mères lorsqu’elles ont eu une AG, voire même une AL. En effet, bien que les données disponibles sur l’innocuité de la poursuite de l’allaitement après la réalisation d’une anesthésie soient rares, les caractéristiques pharmacocinétiques des produits anesthésiques sont rassurantes.
Les quantités d’anesthésiques injectables retrouvées dans le lait maternel sont très faibles (propofol, thiopental) ou décroissent rapidement (étomidate) en raison d’une demi-vie plasmatique très courte, de l’ordre de quelques minutes, ce qui limite le risque d’accumulation dans le lait. En outre, leur biodisponibilité par voie orale est souvent négligeable. Ainsi, même s’il existe un passage de certains anesthésiques dans le lait maternel, leur absorption par le nouveau-né sera quasi nulle et aucun effet indésirable n’est attendu. Concernant les gaz anesthésiques, il n’existe pas ou peu de données sur leur utilisation chez la femme qui allaite. Toutefois, ils ont eux aussi une demi-vie plasmatique très courte, et leur excrétion lactée est très probablement nulle. Enfin, il n’existe pas de précaution particulière liée aux curares, quant à l’allaitement.
Parmi les anesthésiques locaux et régionaux, les seules données disponibles concernent la lidocaïne et la bupivacaïne. Leur passage dans le lait est très faible et aucun effet indésirable n’a été observé chez les enfants allaités. Les autres molécules ont des propriétés similaires avec une biodisponibilité orale faible, et il est très
improbable qu’elles puissent induire un effet indésirable chez le nourrisson allaité. Il est cependant préférable de choisir une molécule pour laquelle des données sont disponibles. La durée et la qualité de l’analgésie peuvent être significativement augmentées par l’adjonction d’un agent vasoconstricteur (adrénaline ou noradrénaline) dont le passage dans le lait est possible, mais qui sera détruit dans le tractus digestif du nourrisson avant de pouvoir être absorbé.
Dans la mesure où l’utilisation d’anesthésiques est un événement ponctuel et que ces molécules sont très rapidement éliminées du compartiment plasmatique, la quantité susceptible de passer dans le lait est généralement très faible, avec une absorption digestive improbable chez le nourrisson. Habituellement, une reprise de l’allaitement est donc possible dès lors que la mère a retrouvé un niveau de vigilance autorisant son lever. En effet, le retour à des capacités mentales normales est le signe que les produits ont été éliminés du compartiment plasmatique et donc du compartiment lacté.